Oran – Le cercle militaire d’Oran vers 1900 (source : sigeoise.free.fr)

Longtemps j’ai cherché le cercle militaire.

Je n’arrivais pas à savoir où il était passé, si je cherchais mal ou s’il avait disparu. Je le voyais sur les anciennes photos et je ne le voyais plus sur les récentes.

Mais ce n’est pas si simple.

Le cercle militaire se trouvait sur la place d’armes, en face de l’hôtel de ville, perdu au fin fond d’une très belle allée de palmiers.

Donc sur les photos récentes, je voyais les palmiers et je pensais que le bâtiment était peut-être caché au fond de l’allée.

Il m’a fallu un certain temps (et surtout une confirmation écrite sur un site) pour comprendre que ce cercle militaire avait disparu. Parfois, on tient tellement à certaines choses qu’on ne peut pas se résoudre à les imaginer disparues.

Je ne sais pas du tout ce qu’est un cercle militaire. C’est d’ailleurs extrêmement étrange comme nom. En poésie, on appellerait ça un oxymore, comme un nuit blanche par exemple, deux termes opposés accolés l’un à l’autre et dont la proximité génère une sensation nouvelle.

Wikipedia dit « il exprime ce qui est inconcevable. Il crée donc une nouvelle réalité poétique. Il rend compte aussi de l’absurde.«

Place d’armes avec, à droite, l’entrée du Cercle Militaire (source : hlm de Gambetta)

Je pense que c’est la raison de mon attachement à ce bâtiment. Le cercle rond des militaires carrés est forcément une énigme, et à plus forte raison lorsqu’il disparaît.

Plus énigmatique encore est son emplacement au fond d’une allée de palmiers en plein centre-ville.

Ce qui frappe l’esprit encore une fois, ce sont les palmiers, signe de délicatesse (du moins est-ce comme cela que j’aime les voir) associés au militaire.

Dans « Le silence de la mer » de Vercors, un officier allemand auquel les deux français qui se trouvent obligés de l’accueillir ne veulent pas parler (énième raison de choisir le silence) se montre particulièrement courtois et cultivé.

Le Cercle Militaire (source : le coin de Michel Soler sur le site Oran des années 50)

C’est le sentiment que m’inspire cette allée d’arbres centenaires. Le militaire cultivé et délicat qui médite à l’ombre de la végétation.

Je soupçonne même que c’est pour générer ce genre de sentiments que le cercle militaire s’entoure d’une imposante végétation. Pour nous faire croire qu’il s’y passe des choses délicates, de hautes pensées, de grandes décisions pour le bien du peuple.

Là, au fond de cette allée de palmiers qui penchent leur longues ramures sur les galons des officiers, la protection des hommes est en jeu. Les petites gens peuvent se réjouir, on s’occupe d’eux.

Le bâtiment a été détruit. Les palmiers ne mènent plus nulle part.

La guerre est terminée.

 

Paul Souleyre (mais qui est Paul Souleyre ?)



 

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