Oran – Le quartier de Sidi el-Houari (Capture d’écran Google Earth)

Hier, sur le Forum Culturel Oranais, Sou Maya a gentiment repris Kamel pour lui demander de mettre des sources à ses documents cartographiques.

Et j’ai ainsi pu découvrir René Lespès, géographe d’Oran dans les années 30.

Le livre dont Sou Maya finit par donner le titre est celui-ci :

« Oran, étude de géographie et d’histoires urbaines (Collection du Centenaire de l’Algérie), Paris, F. Alcan, 1938.«

Les sources, c’est pénible, mais ça a beaucoup d’utilités :

  • La première d’entre toutes est qu’il faut toujours rendre à César ce qui lui appartient.
  • La seconde est qu’on peut aller chercher des renseignements sur la personne. Dans une ville comme Oran, il n’est pas négligeable de savoir si le document provient d’un Algérien, d’un Français, d’un Espagnol ou d’un Turc.
  • La troisième est qu’on connait la date, ce qui permet de replacer les choses dans leur contexte. A Oran, il vaut mieux bien connaître le contexte d’une parution. On marche sur des œufs.
  • La dernière que je retiendrai ici est que l’apparition d’une source provoque en cascade des dizaines de petits évènements annexes non négligeables. Comme le surgissement de cet extrait sur lequel je suis tombé tout à l’heure.

« Un premier trait qui mérite de retenir l’attention, c’est que le vrai port naturel d’Oran est Mers-El-Kebir, situé à 7km de la ville et séparé d’elle par le massif du Murdjajo qui surplombe directement la mer. Mers-el-Kébir ne fournissait pas d’emplacement pour une grande ville, et la topographie s’opposait à une pénétration vers l’intérieur«

C’est tout bête mais je n’y avais jamais réfléchi.

Je dois être le seul sur cette planète à ne pas avoir vu que Mers-El-Kebir était le port naturel d’Oran et que le port d’Oran n’était pas naturel du tout.

Et je dois être le seul à ne pas avoir vu que le port d’Oran était uniquement là parce qu’il y avait une ville, et que cette ville était uniquement là parce qu’elle n’était pas bloquée dans son développement par la présence du Murdjajo.

J’ai de gros progrès à faire en géographie urbaine. Mais je progresse avec mon vieux plan d’Oran.

La citation que j’ai donnée un peu plus haut n’est même pas tirée de René Lespès mais d’un certain Augustin Bernard qui cite Lespès dans les Annales de Géographie de 1939.

René Lespès a déjà fait un premier travail sur Alger en 1930, il continue avec Oran en 1938, ce qui permet de comparer les deux plus grandes villes du pays. Je n’ai pas eu le temps de tout regarder.

Mais on tombe sur beaucoup d’autres choses. Il suffit de taper dans Google : « oran urbain lespes pdf » et on découvre des tas de documents très pointus. Bien sûr, il faut les lire et ce n’est pas toujours évident.

Mais enfin, c’est là, et c’est déjà pas mal. (A noter que depuis cet article, j’ai pu découvrir Robert Tinthoin ainsi que Émile Cayla évoqué dans un article du début de l’année 2013)

Le premier document pdf sur lequel je suis tombé et que j’ai commencé à lire s’appelle « Figures et Plans d’Oran – 1931-1936 ou les années de tous les Danger » . Il est écrit par Jean-Pierre Frey, Architecte-Sociologue, Professeur à l’Institut d’Urbanisme de paris, Université Parix XII-Val de Marne.

Je ne vais bien sûr pas entrer dans le détail. Je citerai juste un passage qui montre tout ce qu’on peut trouver d’intéressant dans ce type de document (je vais un peu remodeler le format pour en faciliter la lecture parce que les phrases sont longues et sur un écran d’ordinateur, on lâche prise) :

  • Le développement rapide des faubourgs
  • la nécessaire articulation entre les infrastructures de la ville ancienne et l’orientation générale des extensions, 
  • les exigences grandissantes en matière d’hygiène et d’assainissement des nouvelles constructions (et en particulier celles qui, parce que modestes, supposait une intervention éclairée des pouvoirs publics pour éviter les défectuosités de toute sorte) appelaient des mesures d’une ordre moins débridé et d’une toute autre envergure :
  1. L’abandon du quartier du port comme centre administratif au profit du plateau.
  2. Le contournement même du boulevard Malakoff – incapable d’accueillir le principal trafic en provenance de la route de Tlemcen vers le port – grâce au Bd du Marechal Joffre avaient notamment privilégié le développement d’Eckmühl, au point d’en faire le principal faubourg de la ville. 
  3. La rue Philippe perdait de son importance et le contournement du fort par la route du Port pour accéder au nouveau centre-ville allait favoriser les extensions moins contraintes par la topographie de Kargentah. 

Bref, la ville avait brusquement changé de configuration d’ensemble à la fin du XIX° siècle et les autorités entendaient profiter des opportunités et obligations de la législation pour la moderniser.

Ce document est quand même une merveille. Pour qui connaît un peu le nom des rues et des quartiers d’Oran, on voit  subitement toute l’activité de la ville se déplacer du bas vers le haut. C’est presque surréaliste. On voit Sidi El Houari devenir un quartier historique.

Les quartiers d’Oran – Carte sur ce site

 

Finalement, Kamel n’a pas tardé à répondre à Sou Maya pour donner une source à son document :

« C’est dans la thèse doctorale du Sadek Benkadda « essai d’analyse de la transition d’une ville algérienne vers la modernité urbaine » 1732-1912. Voilà pour les précisions ».

Je ne sais pas très bien qui de Sou Maya ou de Kamel a raison mais ce n’est pas bien grave.

Deux sources au lieu d’une, je suis comblé.

 

Paul Souleyre (mais qui est Paul Souleyre ?)



 

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