Escaliers de la gare saint Charles à Marseille

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J’allais mettre un autre titre.

Psychogénéalogie des prénoms de Memoblog : après Paul, le cas Charles.

Et puis à la réflexion, il ne s’agit pas vraiment de prénom, mais plutôt de lieux de vie associés à un prénom (qui peut d’ailleurs aussi être un nom de famille).

Ce qui m’étonne le plus dans cette histoire de Charles, c’est la façon dont les évidences ont mis du temps à surgir. Par exemple, ce n’est que très récemment que je me suis rappelé avoir habité deux ans à… Charleville-Mézières, dans les Ardennes.

Je me souviens d’une discussion avec une amie sur le parvis de la gare St-Charles à Marseille où je lui disais que vraiment, j’étais étonné de me retrouver là, parce qu’il n’y avait aucune trace de Charles dans mon histoire. Ah si ! lui disais-je, une petite trace tout de même : j’ai passé mon enfance dans un grand immeuble (une barre) qui portait le nom de Carlitos (« petit Charles » en espagnol) mais à part ça, je ne vois pas.

Perpignan – « Mur des disparus » – Avril 2015

Je ne pensais même pas non plus que cette ville était le lieu où mon oncle (frère de ma mère) et parrain avait finalement décidé de se poser jusqu’à mourir d’une crise cardiaque au début des années 90. J’avais évacué tout un tas d’informations pourtant cruciales. Peut-être trop cruciales justement, je ne voulais probablement pas les voir. Pourquoi ? Je ne sais toujours pas. 

Mais assez vite, tout de même, les choses sont remontées à la surface.

À Oran, entre 1954 et 1962, mes grands-parents maternels – et par la force des choses ma mère et son frère (mon oncle donc) – n’habitaient pas n’importe où : ils se trouvaient au niveau du pont Saint Charles. La rue de Mostaganem est longue et il ne suffit pas de dire, « ils habitaient rue de Mostaganem » pour repérer leur lieu d’habitation, il faut préciser à quel endroit de la rue on se situe. Comme tout le monde, j’ai donc utilisé le nom de ce pont pour signaler aux uns et aux autres à quel niveau de la rue l’immeuble de mes grands-parents (immeuble Roblès) se dressait. Il y a quelques jours, j’ai eu le neveu de mon grand-père au téléphone, et je lui ai rappelé le nom de cet endroit où il avait lui-même logé avec la famille pendant quelques mois en attendant d’intégrer un internat. C’est lorsque j’ai prononcé le « pont Saint Charles » que des frissons ont parcouru ses bras. Il n’a pas pu se retenir de me le dire.

Tout le monde devait utiliser ce nom pour localiser l’endroit. 

Donc je regarde la suite de l’histoire, c’est-à-dire l’après 62 en France, et je me fais deux remarques :

1 – Ma mère est allée s’installer à Pau dans une grande barre qui porte le nom de Carlitos, « petit Charles ». Et ceci dès 1963 ou 1964. Elle a 18 ans, ce sont ses parents qui décident d’habiter là. Ont-ils conscience qu’ils se trouvent de nouveau sous la bannière d’un Charles ? Je ne sais pas, mais ma mère achètera l’appartement à ses parents au début des années 70, et j’y grandirai moi-même jusqu’au milieu des années 80.

2 – Son frère est allé s’installer à Marseille, dans une ville dont la gare porte le nom de Saint Charles. Il faut savoir que le pont Saint Charles à Oran n’est pas du tout un pont qui permet d’enjamber une rivière mais bien une voie qui permet au train de circuler en centre-ville parce que la gare est à deux pas. En une ou deux minutes à pied, on y est. Et l’école primaire elle-même (école Lamoricière dans le temps, Ben Boulaïd actuellement) où travaillent comme instituteurs mes deux grands-parents à l’époque, et où ma mère et son frère font leur scolarité, donne sur le minaret de la gare. Donc la gare d’Oran et Saint Charles sont associées dans la tête de tous ceux qui connaissent un peu cette partie de la ville.

Et puis, comme le début d’une longue initiation qui doit me ramener au Saint Charles originel (celui d’Oran donc) la première ville où j’atterris lorsque débute ma vie professionnelle sera Charleville-Mézières. Une ville perdue dans le nord-est de la France avec deux spécificités marquantes : c’est la ville de Rimbaud et il s’y déroule un festival des marionnettes tous les mois de septembre. C’est la première fois que je me retrouve seul, complètement seul, loin de mes proches qui habitent tous dans le Sud-Ouest.

Et je plonge dans les livres.

Je ne sais pas encore que la recherche vient de commencer et qu’elle me mènera, côté paternel cette fois-ci, à un certain Louis Charles, disparu en gare d’Oran le 5 juillet 1962.

 

Paul Souleyre (mais qui est Paul Souleyre ?)



 

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