Alsaciens installés à Oran (source : hors-série Geohistoire)

Du côté de mon père (et pour être plus précis, du côté paternel de mon père) les origines sont lorraines.

Château-Salins.

Quand j’aurai un peu de temps devant moi, j’irai creuser par là.

On parle malheureusement peu des lorrains dans les livres que je feuillette, on parle surtout des alsaciens. Donc j’essaie de généraliser, mais je n’aime pas beaucoup, on a de grandes chances de dire n’importe quoi.

Je vais quand même prendre le risque.

Ce qui se dit sur cette population m’intéresse. En 1840, ils avaient le choix entre l’Algérie et l’Amérique. C’est un drôle de choix ; deux mondes radicalement différents.

Le problème quand on émigre, c’est qu’on ne sait jamais très bien ce qu’on va trouver au bout de la route. Du coup, on se fie à des ragots. Et il y en a même dont le métier est de faire courir des ragots sur le pays d’accueil histoire de ramasser le maximum de candidats. « Des agents recruteurs français sillonnèrent donc la Belgique, l’Allemagne, la Suisse, et un comité central d’émigration vers l’Algérie fut créé spécialement pour ces populations.«

Hors-série de Geohistoire , avril-mai 2012 (source : pdfmagazines.org)

C’est dans le Hors-Série GeoHistoire, 1830-1962, l’Algérie, de la conquête française à l’Indépendance.

Excellent hors-série. J’y apprends par exemple que le capitaine Gérard dont je parlais dans cet article, célèbre tueur de lions, n’en a guère tué qu’une trentaine et a surtout été utilisé par la propagande française pour redorer son blason auprès du peuple algérien, lequel « vénéraient les exploits de cet homme pour son adresse et son courage.«

En ce qui concerne les alsaciens, là aussi, on se démena beaucoup pour leur faire prendre des vessies pour des lanternes. L’être humain est tellement malléable (parce que tellement désespéré) qu’on arrive à lui faire croire qu’il existe un « eldorado algérien.«

« On organisa ce courant migratoire en multipliant les garanties pour les futurs colons, en facilitant leurs démarches et en développant une propagande dans leurs langues respectives. Mais là encore, les résultats furent décevants. « L’eldorado algérien » n’arriva jamais à concurrencer la ruée vers l’or et les nouvelles « frontières » américaines.

Il faut dire que les conditions réelles de l’installation en Algérie ne correspondaient pas toujours aux engagements pris. Allemands et suisses supportaient mal les rigueurs du climat et, quoique d’apparence robuste, offraient peu de résistance aux fièvres paludéennes… La mortalité qui les affectait dépassait de beaucoup celle des autres populations.«

Ce n’est pas tous les jours qu’on lit une telle faiblesse à propos des allemands. Apparemment, l’Algérie ne leur convient pas.

Ma famille provient de la génération qui a migré après 1870, suite à l’annexion de l’Alsace et la Lorraine.

« les 33 000 Alsaciens et Lorrains qui migrèrent en Algérie au XIX°S le firent surtout pour des raisons économiques et démographiques – leur région était très densément peuplée. Seuls 5000 individus firent la traversée suite à l’annexion de ces deux départements par la Prusse, en 1871.«

Mon œil s’est arrêté sur ce chiffre : 5000

C’est étonnant, la puissance des chiffres.

L’avenue Aristide Briand à Choupot, pas loin de l’endroit où habitait mon père, issu d’une famille lorraine arrivée en 1872 (source : le coin de Marcel Morvan sur le site Oran des années 50)

Brutalement, je me trouve confronté à mes racines. Je suis là-dedans. Dans cette catégorie. Dans ce chiffre tout rond de ceux qui arrivent de l’Est de la France et qui sont partis en Algérie en 1871.

5000, mine de rien, ça restreint pas mal le champ.

Surtout que la majorité doit être constituée d’alsaciens. Je me demande si on peut chiffrer les lorrains.

En tout cas, quand j’irai à Château-Salins, je pourrai leur dire que je fais partie de la descendance des 5000 qui sont partis en 1871. Ça fait vraiment pionnier pour le coup.

C’est sûr que ça encourage la construction de mythes en carton. Et les mythes, c’est comme les jolies histoires, ça réconforte l’esprit.

L’erreur, ensuite, c’est d’y croire.

Pour l’heure, laissons-nous réconforter par le mythe des 5000.

Quand on est à la recherche d’un ancrage, c’est toujours bon à prendre.

 

Paul Souleyre (mais qui est Paul Souleyre ?)



 

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