C’est toujours le hasard qui m’ouvre les yeux sur certaines réalités.
Les livres et les paroles des uns et des autres sont souvent univoques.
Le cas de Halima Ziani-Benyoussef dite Caïda Halima deviendra désormais emblématique des petites choses derrière lesquelles je cours pour tenter de me sortir des ornières actuelles.
Le mythe de la grande fraternité entre le peuple algérien et les Français d’Algérie tel que j’ai pu le lire parfois dans certains textes m’a toujours laissé perplexe. Les mythes du méchant Français et du gentil Algérien, ou du méchant Algérien et du gentil Français, tout autant.
J’ai du mal à croire à une vérité simple et générale. C’est contraire à ce que j’ai sous les yeux depuis 40 ans.
On m’a toujours fourni des exemples tirés par les cheveux et peu convaincants.
Avec Caïda Halima, j’ai enfin mon premier exemple digne de ce nom d’une relation forte et respectable entre Algériens et Français sous la colonisation. Et en plus, cerise sur le gâteau, c’est une femme algérienne qui tient tout dans sa main.
Je suis de moins en moins naïf sur les femmes algériennes.
Et pourtant si j’étais allé sur Internet, j’aurais pu avoir une idée déformée de la situation.
Mais c’est toujours dans les petites choses que se trouvent les grandes.
Au lieu d’un titre racoleur sur CityDZ Magazine, j’ai quelque chose de plus nuancé sous la plume de Saddek Benkada, sociologue et historien, dans le livre que Kouider Metaïr consacre à Oran en 2004 :
« Caïda Halima fréquenta les représentants de la société européenne.
Le Dr Jules Abadie, chirurgien renommé à Oran, était le médecin personnel et le confident de Caïda Halima. Délégué régional de la Croix Rouge Française, il animait une oeuvre pour la protection de l’enfance. Sa femme, d’origine russe, médecin elle aussi, s’occupait de l’assistance médicale des femmes musulmanes.
A ce titre, Caïda Halima, faisait souvent appel au couple Abadie pour la conseiller dans ses actions caritatives et d’assistance médicale envers la population algérienne. Le Dr Jules Aabadie fit admettre Caïda Halima comme membre de la section oranaise de la Croix Rouge Française. C’est en cette qualité qu’elle fut invitée, en mai 1939, à rencontrer Mme la maréchale Lyautey, déléguée d’honneur pour l’Afrique du Nord de la CRF.
Caïda Halima, retenue dans une de ses propriétés, lui fit envoyer une gerbe de fleurs. Elle contribua financièrement à la construction du dispensaire de la SSBM (Société de secours aux blessés militaires), à Saint-Antoine, en face de sa maison.«
Caïda Halima est connue pour sa grande détermination à mener les affaires plutôt bancales de son mari. Le Dr Abadie possédait aussi une très forte personnalité, j’ai eu l’occasion d’en parler il y a quelques jours. Et j’aurais pu en rester à « Qué ni Abadie té salva ! » si je n’étais pas tombé par hasard sur cet extrait.
Les âmes fortes ne se laissent prendre par aucune idéologie.
C’est la leçon que j’en retire.
Paul Souleyre (mais qui est Paul Souleyre ?)