Retour à Alfred Salinas pour un retour aux sources.

Avec les cas de Adolphe Perrier, Nicolas-Auguste Pomel, Gimenez Mas et Juan Pastor.

Dans toute histoire cheminent des noms qui sonnent comme des emblèmes.

Ici, l’histoire d’Oran et de ses origines françaises.

Il existait un « rêve oranais de la même façon qu’il existait un rêve américain, tous deux promettant aux malheureux et aux déshérités la terre promise. »

Un peu plus haut, Salinas précise :

« A l’image de toutes les possessions coloniales, l’Algérie était alors conçue non point comme un territoire livré aux entreprises spéculatrices du capital financier mais comme un dépotoir de déchets humains, le réceptacle de ceux qu’on jugeait indésirables en France et ailleurs. »

Je crois que c’est une des premières choses que j’ai retenue quand j’ai commencé la petite quête de mes origines :

tous ceux qui étaient à Oran (ou presque) l’étaient parce qu’on n’en voulait pas ailleurs.  C’est exagéré, mais il y a forcément une part de vérité.

J’arrive tout droit des rebuts de la méditerranée.

Si on est bien quelque part, il n’y a aucune raison de partir. Donc si on part, c’est qu’il le faut.

« Dans cette optique Oran, au même titre qu’Alger ou Bône, remplissait les fonctions de lieu d’isolement pour pestiférés politiques ou sociaux.

[…] Aux déportés de la Monarchie de Juillet, de la Seconde République, du Second Empire et du gouvernement conservateur de Thiers, que l’on reléguera outre-mer, correspondront les arrivées de bannis espagnols, auteurs de pronunciamientos, de complots ou de révoltes populaires qui auront échoué. »

Adolphe Perrier fonde « L’Echo d’Oran » en 1844 et le Quotidien arbore fièrement 118 ans plus tard : « le plus fort tirage et la plus forte vente de l’Afrique du Nord. »

L’homme était un imprimeur lorrain un peu trop républicain qui fut exilé à Oran par le régime de Louis-Philippe.

Juste dessous, Salinas cite un autre exemple : Nicolas-Auguste Pomel, apprenti paléontologue auvergnat, déclaré « dangereux rouge » suite au coup d’état du 2 décembre 1851. Il est déporté en Oranie où son père est colon au village de Saint-Louis.

Il arrivera à ne pas trop se faire repérer et deviendra maire et président du Conseil général d’Oran au lendemain de la chute de Napoléon III.

Les rebuts français aux commandes de la pensée oranaise du XIX°S. Ce n’est pas rien.

Après 1870, les espagnols déchantent à Oran

Comme le dit Alfred Salinas, les rebuts espagnols seront moins bien lotis.

« La terre d’Algérie ne leur était pas très hospitalière. Rares furent les les gouvernements qui jusqu’au début du XX° siècle surent faire preuve de bienveillance. »

Sauveur Pastor a écrit la biographie romancée de son arrière-grand-oncle Juan Pastor dans le tome 1 d’une longue série toujours en cours, semble-t-il.

Caracoles qui débarque à Mers el-Kebir en juin 1851 avec un ou deux baluchons sur le dos, le bonhomme trace sa route jusqu’à La Senia trois ans plus tard. Une parcelle de 4 hectares lui est concédée. En 20 ans, il multipliera par 10 sa superficie.

Mais c’était avant la chute de Napoléon III, en 1870.

Les Espagnols l’avaient encore à la bonne et se trouvaient bien reçus à Oran. Eugénie l’impératrice « était en quelque sorte l’héritière spirituelle de l’ancien préside espagnol. La cour impériale s’étaient mise à l’heure andalouse. »

« Après 1870, la préférence nationale est mise à l’honneur. La réglementation se fait discriminatoire. Les concessions de terres dans les villages de colonisation créés par l’administration bénéficièrent en quasi-totalité aux Français de souche. 

Durant 33 ans, les Espagnols allaient être pratiquement exclus des programmes des programmes de distribution. »

Je n’écris pas la suite sinon je tombe dans la politique française actuelle. Il faudra juste remplacer par les Espagnols. Et il arrivera ce qui est arrivé à Gimenez Mas en 1873.

« La vie de Gimenez Mas permet de comprendre comment s’articulait souvent l’histoire collective et les itinéraires individuels. Fuyant la répression qui suivit les échecs carlistes et républicains, cet Espagnol avait débarqué à Oran en 1848.

Il s’était établi à Saint-Denis du Sig, bastion des utopistes et des phalanstériens, où il avait acheté des lopins de terre à des colons français qui n’avaient pu s’adapter aux conditions climatiques et agricoles particulières à l’Algérie.

Il siégea au Conseil municipal de 1859 à 1862, profitant de sa position sociale pour défendre les intérêts de ses compatriotes auprès des autorités locales.

Mais à partir de 1873 son activisme politique en faveur de l’Espagne inquiéta le gouvernement français, et en 1884 on décida de l’expulser pour atteinte à la souveraineté nationale, alors même qu’il vivait en Oranie depuis près de quatre décennies, soit bien plus que Pomel qui n’était là que depuis 1852. »

Depuis 1870, il y a un réel problème entre les Français et les Espagnols à Oran.

C’est moins visible que le reste, mais c’est profond.

 

Paul Souleyre (mais qui est Paul Souleyre ?)



 

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