Vendredi dernier, je faisais un saut d’une journée à Paris pour le plaisir de rencontrer Toufik, guide de l’association Bel Horizon qui tente désespérément de sauvegarder le centre historique d’Oran à 60%, en ruine et abandonné.
J’y ai bien sûr appris énormément de choses. On est allé s’installer dans un café à côté de la gare Montparnasse, il a pris son carnet, et il a commencé à me faire plein de petits dessins sur Oran et ses quartiers.
J’ai pensé sortir mon magnétophone pour fixer une parole abondante et puis j’ai laissé tomber. Aucune importance. Ce qui se passe là est d’un autre ordre que la simple conférence. Moi, enfant de Pieds-Noirs, je regarde un algérien d’Oran en train de m’expliquer Oran.
Je regarde et je profite de ce moment rare. Les gens qui connaissent Oran sont des perles.
Ce week-end à Masseube, je suis tombé sur un pied-noir qui m’a aussi parlé d’Oran pendant longtemps. Je connaissais la ville et les lieux dont il parlait, ça l’a encouragé. Il avait fait une longue marche de nuit dans le Murdjajo, pour finalement atterrir au mausolée de Sidi Abdelkader, sur le plateau. Il ne pouvait plus s’arrêter de parler et je ne l’écoutais presque plus, je le regardais. Il brillait de partout.
Dès que j’entends Oran, mon oreille se dresse comme celle d’un chien, je suis à l’affût. Il n’y a plus que ça qui m’intéresse. C’est pathologique. Rien n’est sorti pendant 40 ans. Je suis en pleine thérapie. Mais de quelle maladie ?
Tout ce qui arrive d’Oran me nourrit ; tout ce qui n’en arrive pas m’ennuie.
Je reviendrai sur Masseube parce qu’il y avait de très belles choses. Je reviendrai sur Toufik parce qu’il y avait de très belles choses.
J’ai besoin de tout le monde.
Paul Souleyre (mais qui est Paul Souleyre ?)
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